« Exiger la transparence, le débat libre et argumenté, mener des actions non-violentes
quand ces fondamentaux ne sont pas respectés, ce n’est pas mettre en danger la démocratie,
au contraire » (2)

Exposé des motifs :

            En France, nous constatons au quotidien que les résistances aux choix écologiques, qu’il s’agisse de la transformation du modèle agricole, de la sortie du nucléaire, ou de la transition énergétique, sont fortes, sans doute accrues par la crise. La catastrophe de Fukushima ressuscitant l’horreur de Tchernobyl, les non-choix des « Grenelle I et II », les déceptions des sommets de Rio et de Stockholm, les espoirs apparus au moment du changement de majorité il y a un an et l’absence de perspectives actuelle, suscitent de nombreuses interrogations. Nous avons besoin d’une nouvelle mobilisation pour porter le projet d’Europe écologie-Les Verts dans ce contexte.

            Parallèlement, des militants inscrits ou non dans notre mouvement sont entrés en lutte active, donnant lieu à des représailles policières et judiciaires, dont la forme et la force tendent à se durcir. Cette évolution, amorcée du temps de la droite, ne s’est pas démentie depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir.

Récapitulatif de quelques actions judiciaires en cours parmi d’autres (liste non exhaustive) :

  • des procès en appel début mars 2013, liés aux trains Castor (transports de produits radioactifs) ;
  • durant tout le mois de Mars, nombre de procès visant les actions contre la construction de la ligne THT Maine-Cotentin ;
  • le 12 Avril, rejet par le Conseil d’État du recours en annulation (de 16 opposants, surtout des communes) de l’arrêté d’utilité publique de la ligne Cotentin-Maine ;
  • deux recours au Conseil d’État contre le projet NDdL: abrogation de la DUP pour changement des circonstances de fait et de droit,
  • ·  De nombreuses procédures judiciaires contre des paysans, des manifestants ayant pris part a l’opposition contre les forces de police depuis le mois d’octobre ont été déposées à la commission des pétitions européennes et seront traitées dans les mois qui viennent.
  • le 26 mars 2013 rejet du pourvoi en cassation de la condamnation de huit faucheurs volontaires
  • le 31 Mai 2013 procès suite à arrestation lors du camp anti-THT de Montabot en 2012 ;
  • d’autres procès à venir en Juillet 2013.
  • Les actes de répression on repris ces dernières semaines.

Les manifestations à Notre-Dame-des-Landes sont également réprimées avec la même détermination par le gouvernement. Ce qui se joue est bien le choix d’un modèle de société : maintien des grands projets inutiles et de la priorité au nucléaire, ou, comme nous le voulons, choix d’un modèle social et économique responsable pour la planète et les générations futures, que les choix à venir en matière d’agriculture, d’infrastructures ou d’énergie doivent porter.

Amplification de la répression

            Cette répression se manifeste notamment par la violence physique utilisée par les forces de l’ordre, la judiciarisation systématique de ce type d’action et le développement d’un arsenal pénal « liberticide » (article 222-14-2 du code pénal et fichage via les prélèvements ADN).

            Les forces de l’ordre ont recours aux flash balls, aux grenades lacrymogènes et sonores, aux tasers et à différents gaz contre les manifestants. Les effectifs policiers mobilisés sont très importants et sans proportions avec le caractère non violent des manifestations.

Article 222-14-2 du code pénal instituant un « Délit de participation à un groupement violent » (3):

            Cet article adopté en 2010 renforce la lutte contre les « violences de groupe » en créant une nouvelle incrimination : le fait de« participer sciemment à un groupement… en vue de la préparation… de destructions ou dégradations de biens ».

            Cette nouvelle infraction permet de lutter de façon préventive contre les bandes informelles, peu structurées, pour des actes de violence dite légère. Ceci est punissable d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Fichage ADN (4):

            Pendant les gardes à vues le fichage (empreintes, Adn) est autorisé. La majorité des personnes en garde à vue refusent ces prélèvements, ce qui entraîne une mise en examen automatique.

Cette mesure de prélèvement d’Adn date de 1998 ; elle visait l’établissement d’un fichier d’empreintes génétiques des condamnés définitifs pour infractions sexuelles, le fichier s’étend maintenant à plus de 2 millions de personnes, pour tous délits.

Soutiens et actions EELV

En dehors des appuis de nombreux élus locaux et députés exprimant leur contestation des projets THT, nucléaire, trains Castor, Notre-Dame-des-Landes, EELV a marqué ses positions par plusieurs motions votées au Conseil Fédéral.

  •  En novembre 2011, le conseil fédéral « soutient les initiatives non violentes que prendront les groupes locaux d’EELV ou les associations impliquées dans le mouvement anti-nucléaire au long du parcours du convoi », par le biais de « rassemblements près des voies ferrées dans les principales villes de passage du convoi ».
  • En juillet 2011 « Le Conseil Fédéral décide que… Europe Écologie – Les Verts travaillera avec l’ensemble de ses partenaires de gauche à l’élaboration d’un pacte d’alternative à la politique de l’UMP et de Nicolas Sarkozy…dans lequel l’une des conditions incontournables à l’accord sera l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame des Landes ».
  • En novembre 2012, le conseil Fédéral, après les expulsions et les destructions de maisons à NNDL vote une nouvelle motion qui « Se félicite des interventions des Parlementaires EELV et les invite à poursuivre et à réaffirmer leur opposition au projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, qui ne fait pas partie de l’accord gouvernemental avec le PS ».
  • Peuvent être également cités : le projet 2012 « Vivre mieux » d’EELV qui s’engage pour « l’arrêt immédiat des projets en cours : EPR de Flamanville et de Penly, », et prévoit que « des moyens de production décentralisés et portés par des investissements citoyens et coopératifs seront encouragés ». En février 2013, le communiqué du groupe parlementaire au Sénat sur le projet d’amnistie affirme, « alors que l’action collective est un droit inhérent à toute démocratie, reconnu par les alinéas 6 et 8 du préambule de la Constitution de 1946, trop de nos concitoyens sont inquiétés et subissent des sanctions injustifiées pour avoir osé la contestation. Refus de prélèvement d’ADN, opposition à l’EPR et aux lignes THT, dénonciation des conditions de travail, droits des migrants… Nombreux sont les cas où les citoyens qui expriment légitimement leur engagement subissent une répression et un acharnement injustifiés».
  • Mais les amendements au sénat réduisent la portée de ce projet : le refus d’Adn ne serait amnistié que si les faits le sont. Les domaines de la santé et de l’environnement seraient exclus du champ d’application. Ainsi, les militants écologistes peuvent être inquiétés car ayant été vus dans des manifestations ou des réunions aux côtés de personnes ayant commis des actes délictueux.

Ces luttes de l’ouest de la France peuvent être rapprochées d’autres combats, ayant des enjeux environnementaux, économiques et sanitaires comparables, qui se heurtent au même type de répression : campagnes de communication officielles faisant office de propagande, utilisation de la force publique, procès. Citons particulièrement :

  1. La mobilisation contre la ligne ferroviaire Lyon-Turin
  2. 2.     La lutte contre l’exploration et l’exploitation des gaz et huiles de schiste, (Cévennes, Grenoble, IIe de France notamment) ;
  3. 3.     La mobilisation des faucheurs volontaires contre les OGM

Cette situation pose donc deux questions à EELV:

1- Démocratique : des dispositions législatives liberticides qui visent à réprimer un droit d’expression qui apparaît sous certaines conditions légitime. La non-violence est au fondement des actions évoquées.

Sur ce point une réaffirmation solennelle par les parlementaires d’EELV de leur attachement à ces valeurs apparaît nécessaire.

2- Politique : le parti EELV, débouché politique des combats écologistes, ne peut se couper des organisations qui mènent ces combats. Ces questions sont d’autant plus sensibles que la sortie du nucléaire et l’abandon du projet d’aéroport Notre Dame des     Landes ont été exclus de l’accord EELV/PS, faute d’une position commune. De la même manière le combat des faucheurs volontaires est emblématique des engagements des écologistes pour l’agro-écologie et du refus d’un productivisme agricole déshumanisé et marchand ;

EELV doit poursuivre son engagement contre ce type de projets. Notre parti doit veiller à ne pas se couper du mouvement social et à construire des liens forts entre actions de terrain, position de ces représentants élus et défense de son projet par les responsables de son parti.

Décision

En conséquence, Le conseil fédéral des 25 et 26 mai 2013, notant avec inquiétude que le changement de majorité politique ne s’est traduit par aucune modification des pratiques répressives et judiciaires et n’a pas permis d’évolution du droit,

demande aux député-e-s et au gouvernement :

* L’élargissement en première mesure de la proposition de loi d’amnistie aux questions de santé, d’environnement et de respect des droits de l’Homme, appelant une modification des textes concernés ;

* L’abrogation de l’article 222-14-2 du code pénal et la restriction de l’inscription au FNAEG aux faits concernés par la loi de 1998 (exclusivement terrorisme et délinquance sexuelle) ;

En outre, le Conseil Fédéral

* charge le BE de porter et suivre la mise en œuvre de cette position en toutes circonstances ;

* demande à ses élu-es de faire tout ce qui est de leur responsabilité pour faire adopter cette position.

Unanimité pour

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(1)            Proposition de Loi « portant amnistie des faits commis à l’occasion de mouvements sociaux et d’activités syndicales et revendicatives », adoptée par le Sénat en première lecture le 27 Février 2013.Cette proposition propose l’amnistie des délits et sanctions pour des faits commis lors de mouvements sociaux.

Le 27 Février au Sénat, EELV Esther Benbassa disait :

« Dans le contexte actuel de crise profonde, économique, sociale et écologique, les citoyennes et citoyens sont confrontés à des difficultés majeures, comme le chômage, la précarité, l’absence d’accès au logement, sans oublier les risques environnementaux. L’action collective est un droit inhérent à toute démocratie, il est dûment stipulé par les alinéas 6 et 8 du préambule de la Constitution de 1946. Nombreux, pourtant, ont été et sont nos concitoyens qui, s’engageant légitimement dans de telles actions collectives, ont subi des sanctions injustifiées pour avoir osé la contestation : lutte pour l’emploi, opposition à l’EPR et aux lignes THT, dénonciation des conditions de travail, droits des migrants, refus de prélèvement d’ADN, etc. ».

 Malgré ses interventions au nom du groupe EELV, seules les infractions commises dans le cadre de mouvements sociaux au sein des entreprises et des mouvements collectifs relatifs au droit au logement sont concernées par ce projet, et non d’autres actions d’oppositions environnementales.

 

(2)            https://elus-hautenormandie.eelv.fr/soutien-aux-militant-e-s-du-groupe-dactions-non-violentes-antinucleaires/ (communiqué de presse du 7 décembre 2010

 

(3)        « Le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende “.

 Le Conseil constitutionnel précise (n° 2010-604 DC du 25 février 2010) : « il doit être établi que (la personne) l’a fait en vue de commettre des violences contre les personnes ou les biens, à la condition que la préparation de ces infractions soit caractérisée par un ou plusieurs faits matériels accomplis par l’auteur lui-même ou connus de lui”. Sa mise en œuvre conduit à établir une présomption de culpabilité d’une personne du seul fait de sa participation à un groupement.

(4) FNAEG (fichier national des empreintes génétiques): créé par la Loi Guigou du 18 Juin 1998, il était initialement destiné à recueillir les empreintes génétiques des personnes impliquées dans les infractions à caractères sexuelles. Des lois successives ont étendu son champ d’application (en 2003 aux simples délits). , le FNAEG contenait au 31 août 2012 les profils génétiques de 2039874 individus. Ces informations y restent entre 25 et 40 ans.