Les écologistes ont accueilli avec intérêt la remise du rapport Mathiot « Construire le lycée des possibles » et jugent certaines propositions intéressantes. Ils soutiennent également les revendications des mouvements lycéens, étudiants, des parents d’élèves et de certains syndicats qui, ensemble, alertent sur les effets fortement inégalitaires de l’introduction d’une sélection à l’université et sur le manque de moyens alloués à l’enseignement supérieur.

Pour mieux faire passer une réforme, les gouvernements ont l’habitude d’allumer feux et contre-feux, et l’actuel gouvernement ne déroge pas avec ces habitudes. C’est ainsi que les écologistes interprètent et dénoncent la confusion créée à dessein entre la mise en place de ParcoursSup, la réforme du lycée et du baccalauréat et le déplorable rapport Bergé et Descamps sur les rapports parents-professeurs.

Sur le fond, les inquiétudes exprimées concernant une sélection accrue à l’université via ParcoursSup et certaines propositions du rapport Mathiot sont justifiées. Nous le rappelons : la sélection existe déjà, elle est sociale. Les enfants issus des catégories les moins favorisées accèdent beaucoup plus difficilement à des études supérieures en raison de facteurs tant économiques, notamment via l’accès au logement non traité par ParcoursSup, que culturels. Des inégalités renforcées par la persistance d’un double système d’enseignement supérieur public ouvert (l’université) et très sélectif : classes préparatoires aux grandes écoles, BTS, IUT, etc. qui engendre la concentration des moyens sur les meilleurs élèves et laisse les élèves plus en difficulté dans des formations moins dotées et à l’encadrement plus faible.

La réflexion ouverte par le rapport Mathiot trace, elle, quelques pistes dont Jean-Michel Blanquer ferait bien de s’inspirer : la réduction du nombre d’épreuves au bac, la liberté  donnée aux lycéen-nes de dessiner leur parcours, l’introduction des apprentissages liés à la préparation d’un grand oral, sont autant de propositions qui vont dans le bon sens, si tant est qu’elles soient accompagnées de dispositifs exigeants d’accompagnement pour accroître et non pas réduire l’égalité entre les élèves, les territoires et les établissements. La question de la prise de parole en public est un sujet dans lequel les inégalités sociales s’expriment de façon importante et la formation en ce domaine est importante si une épreuve de type grand oral devait être mise en œuvre.

La création de passerelles plus fluides entre les différentes formations est utile pour éviter d’enfermer trop facilement les élèves dans des voies prédéterminées. De la même manière, l’idée d’un « supplément de cours » qui, à l’instar du service civique volontaire arraché par les associations étudiantes, permettra de valider et valoriser les expériences des lycéen-nes à l’extérieur du strict cadre de leur formation, permet de renforcer l’expérience de la citoyenneté et de prendre en compte une plus large palette de compétences.

Les écologistes expriment toutefois quelques préoccupations majeures. D’une part, par souci d’égalité d’accès et garantir leur gratuité, la formation et la certification doivent rester compétence exclusive de la puissance publique et ne sauraient être confiées à des organismes privés.

D’autre part, nous notons le grand décalage entre les besoins de formation des jeunes dans un monde en pleine crise environnementale, alors que nous atteignons la fin des ressources jusqu’ici connues. Si l’enseignement accru du numérique permet de mieux former les jeunes aux enjeux de notre siècle, des apprentissages seraient nécessaires sur l’histoire et le fonctionnement des ressources naturelles, les savoir-faire nécessaires en cas d’effondrement, etc.

Enfin, le rapport Mathiot présente encore trop largement les lycées comme étant fermés sur eux-mêmes. La formation et la certification qui y sont délivrés devraient pourtant s’ouvrir sur l’environnement des lycées, et accroître la place donnée à l’Europe, par exemple en construisant et en ouvrant à tous un bac européen.

Les écologistes soulignent également que sans moyens, les efforts proposés seront inexistants. Nous déplorons ainsi le manque de moyens dans les universités, à hauteur de 1,5 milliards d’euros, le nombre de places disponibles étant notamment l’un des éléments créateurs d’inégalités et d’injustices pouvant marquer durablement la jeunesse française.

Au lycée, les moyens devraient également être fléchés vers les élèves les plus fragiles, considération absente du rapport Mathiot, et vers une coopération territoriale des établissements.

Julien Bayou et Sandra Regol, porte-parole nationaux