EELV exprime sa plus vive inquiétude au regard des faits d’une extrême gravité qui se déroulent ces derniers jours (mort violente de 5 personnes et de nombreux blessés par balle depuis vendredi 27 janvier) et qui menacent sérieusement la paix civile et la démocratie au Sénégal.

Depuis le début de l’année 2011, de nombreux signes ont alerté l’opinion internationale sur les dérives d’un président octogénaire, Abdoulaye Wade, qui détient le pouvoir depuis douze ans et qui cherche à manipuler la constitution pour le conserver plus longtemps encore. Le large consensus national qui a consacré l’adoption par référendum d’une constitution moderne, en janvier 2001, suite à la première alternance politique démocratique de mars 2000, reposait sur le principe fort de la limitation à 2 mandats présidentiels. Mais ce consensus a été remis en cause par une série d’actes posés par le pouvoir en place. L’aspiration démocratique du peuple sénégalais s’est alors manifestée par l’émergence de mouvements citoyens parmi lesquels le mouvement de jeunesse « Y’en a marre » s’est particulièrement distingué. La 18e tentative de manipulation de la constitution en juin 2011, qui prévoyait de rendre possible l’élection du Président au 1er tour avec 25% des voix seulement, a fédéré l’ensemble des forces vives de la nation (organisations de la société civile, partis politiques, etc.) au cours d’une journée d’action ponctuée par le retrait de ce projet, et qui a débouché sur la création du Mouvement du 23 Juin (M23). Depuis cette date, le M23 a fait de la défense de la démocratie et de la constitution sénégalaise son action centrale afin de préparer des élections les plus équitables et démocratiques à l’occasion des scrutins présidentiel et législatif de 2012.

Or plus la date du scrutin présidentiel du 26 février 2012 approche, plus les libertés publiques semblent se restreindre au Sénégal. Dans un rapport publié jeudi 26 janvier, Amnesty International liste pour l’année 2011 toute une série d’« attaques contre la liberté d’expression, le recours persistant à la torture par les forces de sécurité et l’impunité dont bénéficient les auteurs de violations ». Dans ce contexte, la décision vendredi 27 janvier du Conseil constitutionnel de valider la candidature du président sortant pour un 3e mandat et d’invalider trois candidatures dont celle de Youssou Ndour, a mis le feu aux poudres : manifestations publiques tour à tour interdites puis autorisées (notamment sous la pression de l’Union européenne), enfin durement réprimées; arrestation puis libération de leaders du M23, dont Alioune Tine, personnalité reconnue de la défense des droits humains, jusqu’à la charge policière contre le rassemblement pacifique du 31 janvier qui s’est soldé par la mort de 2 personnes écrasées par un camion anti-émeute.

Un tel dialogue de sourds ne peut mener qu’à plus de frustration et plus de violence. Et Abdoulaye Wade, qui fut longtemps un opposant courageux, vainqueur de l’unique élection à 2 tours de l’histoire du pays, ne semble plus en mesure d’entendre son peuple.

EELV pense qu’il est possible d’enrayer ce processus et, à cette fin :

  • demande au gouvernement sénégalais de libérer tous les prisonniers manifestement politiques, de cesser toute répression violente des manifestations pacifiques et de diligenter une enquête par des juges indépendants sur les conditions de la mort des 4 personnes tuées par les forces de police entre le 27 et le 31 juin à Podor et Dakar ;
  • demande aux diplomaties amies du Sénégal, notamment celle de la France, des pays d’Afrique de l’Ouest au sein de la CEDEAO, mais aussi celles des partenaires au développement du Sénégal (Union européenne, Canada, Etats-Unis, Japon, Pays arabes…) d’user de toute leur influence pour parvenir à ce dénouement pacifique de la crise en cours et un départ apaisé du pouvoir pour le Président Wade ;
  • apporte son soutien le plus appuyé aux forces démocratiques, écologistes, pacifistes et citoyennes qui œuvrent pour l’édification d’un Sénégal prospère, juste, équitable, durable et qui donne sa chance à chacun et chacune dans le respect de sa diversité.