L’adoption d’un accord universel pour la lutte contre le réchauffement climatique doit être traduite dans les faits dès 2016 en faisant preuve d’un engagement citoyen et politique sur le long terme. Cet engagement sera au centre de notre projet pour les échéances à venir. Alors que le GIEC a clairement établi que ce sont les 20 prochaines années qui seront déterminantes pour limiter effectivement le réchauffement climatique à 2 degrés, il nous engage sur le long terme.

Il doit être construit dès aujourd’hui avec comme première étape la COP22 de Marrakech.

Exposé des motifs

C’est l’universalité de l’accord de Paris-Le Bourget qui représente le principal apport de la Cop21. Rappelons que le protocole de Kyoto qui fait référence ne couvrait que 20% des émissions de gaz à effet de serre. Il reste à construire les dynamiques de transformation écologique, économique et sociale qui aillent plus loin que le texte même de cet accord qui reste à ce stade trop flou sur certains points importants.

Il est ainsi positif que dans l’accord conclu à Paris-Le Bourget en décembre 2015, les 195 pays participants à la COP21 aient reconnu :

  • « que les changements climatiques représentent une menace immédiate et potentiellement irréversible pour les sociétés humaines et la planète et qu’ils nécessitent donc la coopération la plus large possible de tous les pays« ,
  • « qu’il faudra fortement réduire les émissions mondiales pour atteindre l’objectif ultime de la Convention et soulignant qu’il est urgent de faire face aux changements climatiques« ,
  • « une vive préoccupation sur l’urgence de combler l’écart significatif entre l’effet global des engagements d’atténuation pris par les Parties en termes d’émissions annuelles mondiales de gaz à effet de serre jusqu’à 2020 et les profils d’évolution des émissions globales compatibles avec la perspective de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2° C par rapport aux niveaux préindustriels et de poursuivre l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5° C« ,
  • « qu’il est urgent d’accroître l’appui fourni par les pays développés parties sous la forme de ressources financières, de technologies et d’un renforcement des capacités, de manière prévisible, afin de permettre une action renforcée avant 2020 par les pays en développement parties« ,
  • « que les niveaux des émissions globales de gaz à effet de serre (GES) en 2025 et 2030 estimés sur la base des contributions prévues déterminées au niveau national ne sont pas compatibles avec des scénarios au moindre coût prévoyant une hausse de la température de 2° C, mais se traduisent par un niveau prévisible d’émissions de 55 gigatonnes en 2030« ,
  • « qu’il importe de veiller à l’intégrité de tous les écosystèmes, y compris les océans, et à la protection de la biodiversité, reconnue par certaines cultures comme la Terre nourricière« .

Il est également positif que la reconnaissance du rôle des collectivités territoriales et plus largement de la mobilisation dans les territoires, l’engagement de grandes puissances comme les Etats-Unis et la Chine, ou celui de certains milieux économiques aient été nets.

Mais parce qu’il est universel et devait à ce titre représenter un socle acceptable par l’ensemble des Etats, l’accord présente des limites.

Les engagements financiers sont aujourd’hui insuffisants. Certes, le texte « demande fermement aux pays développés parties d’amplifier leur aide financière, en suivant une feuille de route concrète afin d’atteindre l’objectif consistant à dégager ensemble 100 milliards de dollars des États-Unis par an d’ici à 2020« . Mais cela n’a pas été suivi à ce stade d’engagements financiers des Etats pérennes et à la hauteur des enjeux.

Or, nous réaffirmons fortement le lien entre la lutte contre le changement climatique et les objectifs de justice climatique. Ce sont les petits états insulaires, les états les plus fragiles d’un point de vue climatique et social, particulièrement le continent africain, et certains états asiatiques qui sont aujourd’hui les plus touchés.

Ensuite, si l’objectif est de rester en-dessous d’une augmentation située entre 1,5 et 2° C, les contributions actuelles des Etats nous projettent vers un avenir à +3° C. Alors qu’au niveau mondial nous en sommes déjà à 0,85 °C, aucune obligation contraignante d’amélioration de ces contributions autre qu’un état des lieux périodique n’est imposée à ce stade.

A titre d’exemple, le texte « reconnaît combien il importe de fournir des incitations aux activités de réduction des émissions, s’agissant notamment d’outils tels que les politiques nationales et la tarification du carbone« , mais aucune obligation internationale n’est instituée, laissant les Etats dans un véritable dilemme entre les règles de la concurrence et la nécessité de réguler les émissions de GES.

De même, si le texte reconnait que par « des modes de vie durables et des modes durables de consommation et de production, les pays développés parties montrant la voie, jouent un rôle important pour faire face aux changements climatiques« , les modes actuels de consommation et d’exploitation des ressources terrestres et des terres agricoles ne sont pas explicitement mis en cause et la nécessité de mettre fin au plus vite à l’ère du pétrole et du charbon reste sous-entendue.

Le remplacement des énergies carbonées par les énergies renouvelables et la mise en place de politiques énergétiques de sobriété ne sont pas réellement affirmés. Des secteurs fortement émetteurs de gaz à effet de serre comme l’aviation et les transports maritimes ont été exclus du champ de l’accord. Et la question du nucléaire n’est pas traitée tant les divergences sont fortes entre Etats pro et anti-nucléaires.

Motion

En conséquence, le Conseil fédéral des 09 et 10 janvier 2016 :

  • se réjouit de l’avancée mondiale de la prise de conscience de l’urgence climatique et du développement de pratiques de transformation écologiques;
  • prend acte de la reconnaissance par les participants à la COP21 de l’extrême gravité du dérèglement climatique et de la nécessité de l’enrayer et de l’engagement affiché de continuer le travail accompli pour améliorer les contributions des parties;
  • affirme la nécessité de préciser et définir des dynamiques fortes de transformation du modèle économique et social pour donner à cet accord universel une portée concrète.

Notre priorité est que les contributions nationales soient rapidement réévaluées pour s’inscrire dans le scénario à 1,5°C.

Nous considérons donc nécessaire :

  • d’avancer sur le renoncement à l’exploitation des énergies fossiles et du nucléaire;
  • de refuser des traités de libre-échange économique, n’intégrant pas la justice climatique, en particulier TAFTA, CETA et les APE;
  • de redire l’incompatibilité entre la maitrise du climat et la poursuite de la croissance fondée sur la non prise en compte des ressources limitées de la planète ;

Le Conseil fédéral appelle à la mobilisation citoyenne afin d’exiger du gouvernement français qu’il respecte les engagements pris à la COP21 et en particulier :

  • qu’il annule les autorisations de recherche d’hydrocarbures sur le territoire français;
  • qu’il s’engage au sein de l’Union européenne à la mise en place d’une taxe sur les transactions financières substantielle contribuant à l’Aide Publique au Développement comme prévu originellement, ainsi qu’à la transition énergétique et au Fonds Vert de 100 milliards de dollars par an ;
  • qu’il mette en œuvre une augmentation rapide du montant et de l’assiette de la contribution climat énergie pour atteindre les 100 euros le plus rapidement possible ;
  • qu’il renonce aux grands projets consommateurs destructeurs d’espaces naturels, entraînant une réduction des puits à carbone, notamment au projet d’aéroport de Notre Dame des Landes;
  • qu’il promeuve une véritable mutation de l’économie économe en ressources naturelles et sobre en GES;
  • qu’il promeuve aussi une véritable mutation de l’agriculture vers une agriculture paysanne et biologique, d’agriculture familiale (majoritaire sur la planète) et de pratiques agroécologiques (permaculture, agroforesterie, ..) afin d’inverser son impact très important en terme de GES;
  • qu’il soit mis fin aux politiques économiques libérales productivistes et extractivistes qui reposent sur l’illusoire perspective d’une relance de la croissance.

Le Conseil fédéral souligne que pour permettre la réévaluation des contributions nationales dès 2018, les dynamiques concrètes des acteurs non étatiques seront essentielles. Nous nous engageons donc :

  • à développer rapidement, dans les territoires où nous sommes en responsabilité, les schémas régionaux et plans climat air énergie territoriaux rendus obligatoires par la loi;
  • à agir, dans tous les territoires, avec les initiatives citoyennes et associatives portant des alternatives concrètes;
  • à continuer à nous mobiliser pour le développement rapide des énergies renouvelables en étant vigilants sur la réduction des contraintes administratives et sur des cadres financiers adaptés;
  • à susciter et à accompagner à toutes les échelles les dynamiques communes entre l’ensemble des acteurs non étatiques, associations, collectivités, syndicats, entreprises responsables;
  • à soutenir les politiques de relocalisation économique et de sobriété énergétiques;
  • à porter une attention particulière à la transposition dans les directives européennes d’objectifs climatiques ambitieux;
  • à renforcer dans la perspective de la COP22 les échanges avec les acteurs marocains, en particulier les associations écologistes.

Le Conseil fédéral appelle l’ensemble d’EELV, militants, responsables du parti et élus, à construire une véritable dynamique d’Après Cop21. Pour cela, les citoyennes et les citoyens, les associations et syndicats, les Etats et les collectivités territoriales doivent agir de concert.

Unanimité pour

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