Les plans sociaux se multiplient : Florange, Peugeot, PSA, Goodyear, pour n’en citer que quelques uns. Dans les mois qui ont précédé ces annonces, ce sont des milliers d’intérimaires qui ont pâti de la baisse d’activité. La hausse du chômage est continue depuis 19 mois et de nombreuses personnes arrivent en fin de droits. Ainsi ce n’est qu’en raison de l’arrivée en fin de droits de nombreuses personnes que le nombre de chômeur indemnisés est passé de 48,5% en 2009 à 44,8% en 2011. Alors même que notre système de solidarité devrait être aujourd’hui plus performant que jamais, la France et l’Europe font le choix de la rigueur et chaque dépense est soupesée et évaluée. Dans ce contexte, le rapport de la cour des comptes « Le marché du travail ; face à un chômage élevé mieux cibler les politiques » a une résonance particulière.

Le rapport souligne que le régime d’indemnisation français est plus accessible que dans la plupart des pays européens puisqu’il repose sur une durée minimale de cotisation courte (4 mois) et une période de référence longue (28 mois). Cette accessibilité est en période de crise un élément essentiel pour apporter une protection aux salariés les plus précaires. En effet, le chômage touche inégalement la population active puisque ce sont les plus fragiles (titulaire d’emplois précaires, jeunes salariés peu qualifiés…) qui ont souffert principalement de la crise.

Le rapport souligne également que le niveau d’indemnisation du système français est quelque peu plus élevé que la moyenne européenne, notamment pour les personnes disposant des revenus les plus faibles mais aussi pour ceux disposant des revenus les plus élevés. La préconisation, par la cour des comptes, de mettre en place un taux de remplacement1 dégressif pour les revenus les plus élevés pose question. Si l’on considère le taux de remplacement comme un levier d’ajustement, ne risquons-nous pas d’assister rapidement à une diminution générale de ce taux ? Sans revoir le taux de remplacement des revenus le plus élevés, nous devons envisager la diminution du plafond d’indemnisation maximum – aujourd’hui de 6 161 euros – qui est atteint seulement 0,2% des allocataires. Cette baisse pourrait intervenir dans le cadre d’un mouvement général ayant pour objectif de mieux indemniser les personnes peu rémunérées mais aussi de repenser la redistribution via un impôt prélevé à la source.

Enfin, le rapport s’attaque à une autre spécificité française : le système de l’intermittence. Les annexes 8 et 10 de l’UNEDIC sont la cible depuis plusieurs années du Medef, qui déplore un déficit annuel de 1 milliard d’euros. Etonnement, le Medef est plus silencieux sur le déficit annuel de l’annexe 4 – 1,7 milliards d’euros – qui régit l’indemnisation des travailleurs intérimaires.

Si les annexes 8 et 10 qui sont un soutien à la création doivent être préservées, le recours au travail précaire doit être découragé. Non pas tant dans la volonté de diminuer les déficits, mais de protéger les travailleurs. Pour cela, un taux majoré de la cotisation patronale pour les contrats à durée limitée est un élément essentiel.

Le taux de remplacement et la culture ne doivent pas être des variables d’ajustement. Nos énergies doivent se concentrer ailleurs : Mieux accompagner et mieux former pour favoriser un retour plus rapide à l’emploi. Certes cela ne peut se faire sans transformer notre politique industrielle et notre politique économique. Mais on ne peut s’exempter de repenser le système de formation permettant aux personnes de développer les compétences nécessaires aux emplois de demain. C’est pourquoi nous devons mettre en œuvre un compte individuel de formation attaché non au statut mais à la personne, crédité au début de la vie active de 16 semestres de formation à utiliser à tout moment de sa vie après 16 ans.

Cyrielle Chatelain
Animatrice Pôle Social
Commission Economique, Social et Services Publics
https://economie.eelv.fr/

1Taux de remplacement : rapport entre l’indemnisation versée par l’assurance chômage et le revenu d’activité antérieur