Lors des entretiens organisés ce lundi 3 décembre à Matignon, David Cormand, Secrétaire national, Sandra Regol, Secrétaire nationale adjointe et porte-parole et Yannick Jadot, député européen et tête de liste à l’élection européenne, ont pu exprimer les propositions et conditions des écologistes pour amorcer une sortie de crise face au mal-être social et à la fracturation territoriale sans renoncer ni à la protection du climat, ni à la justice sociale.

Les écologistes portent un projet concret pour la France qui réconcilie celles et ceux qui appréhendent la fin du mois comme la fin du monde. Nous ne demandons pas le report ou la suspension de la taxe carbone, parce que l’urgence climatique implique de trouver des outils. Mais nous déplorons une utilisation unique du levier fiscal là où la situation impliquait de donner une réponse écologique et sociale aux problèmes subis par une majorité de français-es. Nous demandons des réponses rapides et concrètes de lutte contre la vie chère et pour la justice fiscale, une concertation collective pour le pouvoir de vivre ainsi qu’un plan d’investissements écologiques.

Justice fiscale et lutte contre la vie chère

La  fiscalité carbone est nécessaire pour assurer de meilleures conditions de vies à la population. Elle doit être un outil de justice sociale et environnementale et s’appliquer à l’ensemble des énergies fossiles. A ce jour, la fiscalité carbone des ménages est 3 à 6 fois plus taxée que celle des grands pollueurs : une situation injuste qui doit cesser. Concernant le rattrapage de la fiscalité du diesel sur celui de l’essence, celui-ci doit être assorti de mesures compensatoires d’accompagnements plus larges, basées sur des critères sociaux et géographiques.

Les accords internationaux permettant d’exonérer de taxes les carburants de la mondialisation, le kérosène et le fioul lourd, constituent deux niches fiscales pour les plus riches qui doivent être supprimées. En attendant, la taxe d’aéroport doit être doublée et les recettes fléchées vers les infrastructures de transport collectif, celles dont tout le monde bénéficie, dont prioritairement le train.

Face à l’enjeu de la vie chère, la question du SMIC ne peut être éludée. Nous ne pouvons plus accepter d’entendre parler de « coup de pouce » quand il s’agit juste d’aligner l’augmentation du SMIC sur l’augmentation du coût de la vie… Nous demandons à ce que le SMIC net soit revalorisé de 10 %.  

Nous appelons également à la justice fiscale : l’impôt sur la fortune doit être rétabli, de même que la flat tax  qui doit être remplacée pour lutter contre l’évasion fiscale qui grève les finances publiques; enfin le CICE doit être supprimé. Les recettes obtenues doivent être fléchées vers la transition énergétique : efficacité énergétique et énergies renouvelables doivent être encouragées.

Des États généraux de la vie chère

Les débats que soulève le mouvement des gilets jaunes doivent amener à une réorganisation démocratique de la concertation. Les citoyens doivent être associés à la construction de solutions immédiates et concrètes pour plus de justice sociale. A l’instar de certains corps intermédiaires, EELV soutient l’organisation dans les meilleurs délais d’Etats généraux de la vie chère basés sur les besoins des personnes et intégrant des gilets jaunes  

La politique fiscale doit faire l’objet d’une réforme en toute transparence afin de la rendre juste, redistributive et écologique. Cette réforme doit assurer une lutte effective contre l’optimisation et l’évasion fiscale qui représentent 80 milliards de manque à gagner par l’État chaque année.

Nous demandons que ces Etats généraux se saisissent de l’encadrement des loyers qui donnera de nouveaux droits aux locataires du parc privé pour faire baisser les loyers qui dépassent les bornes de la décence. La loi ALUR doit constituer la base de ce travail. Face à la hausse des loyers qui appauvrit les locataires depuis dix ans, face aux marchands de sommeil qui vivent de la misère de nos concitoyen-nes, il n’est plus tolérable de poursuivre le laisser-faire.

Les aides aux plus fragiles doivent être restaurées, à commencer par les APL qui doivent être revalorisées. L’argent de la taxation des grands pollueurs, grandes fortunes et multinationales, ainsi que celui de l’évasion fiscale peut financer ces réformes sans augmenter la taxation des ménages et des petites et moyennes entreprises.

Un vaste programme d’investissements écologiques

Chaque euro collecté doit être rendu à la transition écologique. Les recettes (7,8 milliards d’euros en 2018) qui découlent de l’augmentation de la fiscalité écologique doivent être dédiées à la mise en place de solutions bénéfiques pour le plus grand nombre. De ce point de vue, nous regrettons que ni la programmation pluriannuelle de l’énergie ni le projet de loi mobilité ne répondent aux enjeux de la période.

Les écologistes appellent à rénover au plus vite les 2,7 millions de passoires énergétiques occupés par des ménages en situation de précarité énergétique. Se doter d’une véritable feuille de route à cet égard doit permettre de concilier un allègement de leur budget avec un cercle vertueux d’économies sur d’autres aspects comme les dépenses de santé. C’est aussi un secteur qui est amené à créer plusieurs centaines de milliers d’emplois. C’est donc un investissement qui présente de nombreux bénéfices pour la société.

En outre, la pollution coûte chaque année 100 milliards d’euros à la France et le diesel à lui seul 60 milliards, en dépenses de santé, de compensations, et autres. Ces dépenses s’alourdissent chaque année avec l’augmentation des pollutions générées : lutter contre la pollution est autant une mesure d’équilibre des finances publiques que de santé publique.

L’argent des banques ne peut plus continuer à financer la pollution. Cette année encore, les investissements des banques françaises dans les énergies fossiles sont en hausse, passant souvent par des financements indirects pour camoufler leurs forfaits. L’Etat ne peut laisser l’argent des ménages financer ces pollueurs. Les subventions à ces entreprises doivent également cesser.

Enfin, le mouvement des gilets jaunes a singulièrement fait ressortir une question territoriale qui ne se réduit pas à une conflictualité entre centralité et périphérie. La planification jacobine dans notre pays a conduit à un désaménagement de notre territoire alors même que la promesse était son aménagement. Nos territoires doivent être réparés. Un moratoire sur les centres commerciaux en périphérie, qui tuent la vie des centre-villes en contraignant à l’emploi de la voiture et en réduisant commerces et services publics, doit être mis en œuvre. Les investissements d’infrastructures doivent être concentrés en direction des infrastructures de transports collectifs ou de fret ferroviaire utiles. Les services publics doivent être revalorisés et renforcés dans les territoires qui ont été abandonnés.