Tribune – Une action de groupe étendue à la santé et à l’environnement?

Michèle Bonneton (députée), Leila Aïchi (sénatrice), Brigitte Allain (députée), Jean-Vincent Placé (sénateur), Jean-Louis Roumégas (député).

Le projet de loi « Consommation » en cours d’examen en ce moment à l’Assemblée Nationale apporte de nombreuses améliorations aux droits et à l’information des consommateurs. Le texte inscrit notamment une innovation importante dans le droit français, la possibilité pour les consommateurs lésés de se regrouper pour réaliser une action en justice. L’ « action de groupe » est un véritable contrepoids citoyen face aux abus des entreprises aux pratiques illégales, comme par exemple les compagnies téléphoniques qui s’entendaient sur les prix et pratiquaient des surfacturations. Le consommateur pourra aussi agir dans les cas de tromperie comme celui des lasagnes à la viande de cheval, ou l’obsolescence programmée, stratagème utilisé par certains industriels pour écourter la durée de vie de nos produits, contre lequel les écologistes proposent notamment une définition juridique pour faciliter les actions de groupe. En faisant masse, les citoyens pourront désormais obtenir réparation du préjudice matériel subit, mais également influencer en amont les pratiques des entreprises qui seraient ainsi découragées de « tenter l’entourloupe ».

Si l’inscription de l‘action de groupe dans la législation française est une revendication historique des écologistes, nous pensons qu’il est regrettable de limiter cette avancée aux questions de consommation et de ne pas l’étendre aux domaines environnementaux et sanitaires. Nous avons le sentiment que le texte s’arrête en chemin.

Aux États-Unis, l’action de groupe, appelée « class action », n’est pas limitée aux seules questions de la consommation. Nous avons tous en tête le filmErin Brockovich : il illustre l’histoire vraie de riverains d’une société de distribution d’énergie rejetant des produits toxiques dans l’eau. Ces personnes se sont regroupés pour porter plainte contre l’entreprise qui les rendait malades. La justice américaine a reconnu le préjudice pour leur santé et l’entreprise a été condamnée à indemniser les victimes. Parce qu’ils étaient associés dans une action commune en justice la condamnation a été à la hauteur des dégâts. Ce type d’action restera malheureusement impossible en France ; pourtant les scandales sanitaires et environnementaux ne manquent pas : que ce soit les femmes victimes des prothèses PIP, les victimes de l’amiante ou du médiator, des marées noires, des pesticides, etc. Dans ces domaines, ce que permettrait la loi, ce sont des actions de groupe pour le remboursement de la prothèse défaillante, de la boite de médicament et non pas le dommage sur la santé, ni le dommage moral.

Le Gouvernement nous oppose la difficulté de mesurer l’atteinte corporelle, morale, ou le coût de la dégradation de l’environnement. Pourtant ce type d’action n’existe pas seulement de l’autre côté de l’Atlantique, mais également en Europe comme au Royaume-Uni, au Portugal, aux Pays-Bas ou encore en Suède, où elle est déjà opérationnelle et utilisée sur un champ d’action beaucoup plus vaste.

Si nous défendons l’extension de l’action de groupe à l’environnement et la santé c’est parce que les expériences des années passées montrent que nos concitoyens ont besoin d’être protégés dans ces domaines. Nous demandons au gouvernement de répondre à cette attente.